Les IPADs de David Hockney

L’art numérique ou “digital art” commence à faire surface. Est-ce un nouveau territoire à explorer, une nouvelle écriture à lire ou un voyage dans un monde parallèle, virtuel ?

En regardant ma petite lithographie de D.Hockney, je me perdais dans cette piscine toute bleue, j’oubliais tout. J’ai bondi de mon fauteuil et ai enfilé ma veste. En cette semaine où j’avais un peu de temps pour moi, j’avais décidé d’aller voir l’exposition de D.Hockney à la Fondation Bergé-YSL.

J’avais trouvé l’idée intéressante, sympathique : visiter une exposition virtuelle.

J’avais descendu l’Avenue Marceau, sous la neige. Le sol glissait. Le vent fouettait mon visage et mes mains. En passant devant le 54, j’ai pensé à P. un instant, puis il s’était échappé de mes pensées. Je me suis engouffrée dans la rue Léonce Raynaud, et suis rentrée dans l’hôtel particulier. L’exposition est au 1er étage.

Le concept est de mémoire complètement inédit : David Hockney présente des dessins colorés, faits sur IPAD, et envoyés par mail.

Il a fait déjà l’expérience il y a une vingtaine d’années, en faxant ses dessins à une galerie. Une fois l’exposition terminée, la Galerie avait demandé comment lui transmettre les oeuvres. Hockney avait répondu : par fax !

L’exposition  Avenue Marceau, se concentrait sur deux pièces. Sur la droite, étaient disposés 20 I Phones, vraiment trop petits à regarder, et sur la gauche, 20 IPADs. Dans une seconde salle, étaient projetées au hasard, trois oeuvres, côte à côte, tels des triptyques

D.Hockney expose des oeuvres doublement « virtuelles », puisqu’il s’agit de dessins envoyés par e-mail et exposés sur des tablettes ou des téléphones.

Ces oeuvres dématérialisées, représentaient des dessins très colorés de D.Hockney.

Impossible de juger de la géographie du dessin, du relief du crayon, de l’épaisseur du trait, de l’étoffe du papier.

Ces oeuvres sont sans relief, puisque dessinées directement sur les tablettes.

Leur géographie est inexistante, si ce n’est par le voyage qu’elles effectuent à travers les fils du web.

La matière de ces dessins est juste le résultat final. Il est possible de lire la construction de l’oeuvre, puisqu’elle se dessine sous les yeux du visiteur. Cela m’a fait penser au film de HG Clouzot : « Le mystère PICASSO ».

Le visiteur voit devant lui, les oeuvres se construire au fur et à mesure. Lorsque le dessin était terminé, l’image se figeait.

Un film était par ailleurs présenté : je voyais l’artiste dessiner avec son index directement sur l’écran de l’IPAD. Il disposait d’une palette de couleur via un programme qu’il appelait lorsqu’il le souhaitait.

Les images très colorées, rafraîchissantes se trouvent derrière l’écran des tablettes.

Je me demandais si c’était vraiment une oeuvre d’art. Il n’est pas possible d’en acheter. Impossible de déterminer le prix de chacune des oeuvres. D’ailleurs, l’artiste ne cherche pas à les mettre sur le marché, puisqu’il les offre à des amis, en leur envoyant l’oeuvre par e-mail?

Chaque dessin pouvait se reproduire, se démultiplier à l’infini. Mais où est l’original ? Il n’est pas tangible, pas matériel.

Quelle est la matière première de ce type d’art ? Les pensées de l’artiste ? Le trait, la couleur ?

Que dire d’une oeuvre d’art qui apparaît sur un terminal ordinateur ? Selon Hockney, – il n’a pas complètement tort-, chaque dessin apparaîtra différemment sur chaque terminal. Le réglage des couleurs, la résolution du terminal, font que le dessin apparaîtra de manière différente, donc unique. De même, chaque impression sera unique.

Mais ce qui apparaîtra sur le terminal, ne sera pas l’original ou une copie, ou un exemplaire numéroté. Ce ne sera qu’une image, qu’un reflet.

Aurais-je envie d’avoir une oeuvre d’art numérique chez moi ? L’avantage est de pouvoir changer facilement d’oeuvre d’art sur son mur. Donc, cela mène vers l’éphémère, l’accélération du temps.

Cela faisait longtemps que j’avais dématérialisé mes photos, toute la musique que j’avais. Mais je n’aime guère les photos, ou la musique. Je lisais des articles de journaux, ou des livres, qui ne sont pas à mes yeux, de la vraie littérature. Il me fallait toucher le papier pour lire ou pour écrire ou regarder des oeuvres d’art.

Je ne me sentais pas prête à passer à l’art numérique pour l’art, la peinture, la sculpture, préférant le caractère tangible de mes estampes , au caractère éphémère d’un terminal !

Je suis sortie de l’exposition songeuse.

L’exposition est un tel succès, que déjà plusieurs musées et galeries, dans le monde entier, la réclame.

Elle va donc devenir itinérante, après avoir quitté l’hôtel particulier du 16ème arrondissement

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Bleu Piscine – D.HOCKNEY

ou les 4 piscines que je retiens de D.HOCKNEY

Devant cette page blanche,  depuis mon bureau, ma table d’écriture, lorsque je lève doucement les yeux, je plonge dans la petite estampe de D.Hockney, dans la piscine, dans ma piscine,  pour me perdre, puiser mon encre.

Je l’avais achetée il y a quelques années.

La piscine était un thème récurrent dans l’oeuvre de D.Hockney. A la fois, peintre, dessinateur, photographe,  D.Hockney déclinent ses piscines, les répètent  en variant à chaque fois.

Le plus souvent le plongeoir était présent, prédominant. En regardant ce plongeoir, je m’imaginais en train d’avancer sur cet étroit espace rectangulaire, placer mes pieds délicatement au bord, plier mes pieds nus contre l’arête de cette planche. Mes pieds sont joints. Les muscles de mes jambes se contractent, mon ventre se creuse par la tension des abdominaux. Je courbe doucement mon dos.

Je secoue mes bras puis les lèvent à hauteur de ma tête.

Je vois se refléter dans l’eau la maison, un bout du jardin, le ciel tout bleu. Le soleil a légèrement bruni ma peau.

J’imagine un instant d’immobilité, de concentration, avant de plonger, de faire le grand saut.

J’entends le splash de mon corps au contact de l’eau, de mon corps qui se glisse, se faufile dans l’eau.

La machine se met en marche.

J’entends ma respiration. Je n’aime pas ce bruit lorsque mes oreilles sont plongées dans l’eau. Le photo montage ci-dessous de D.Hockney reflète je pense assez bien mon aspect lorsque je suis dans l’eau.

Mes jambes font des losanges; mes bras se plient et se déplient. Je nage si mal, que je dois apparaître telle une grenouille affolée. Je me retourne alors sur le dos, et je me calme.

Quand je suis ainsi, sur le dos, dans une piscine, je ne pense à rien, j’oublie tout.

Je sors de l’eau, toujours frigorifiée, j’attrape une grande serviette, le soleil est là pour que mon corps se dore, sèche, se réchauffe.

Sur le transat, mes yeux cachés derrière mes grandes lunettes de soleil en écaille, examinent  la géographie de la piscine :

Bien sûr sa forme, rectangulaire si possible, ses proportions, ses différentes profondeurs, le plan d’eau ou la surface qui peut s’iriser avec un souffle de vent. Le plan se froisse. Les plis apparaissent.

J’aime par dessus tout explorer le plongeoir, et surtout son ombre, qui évolue selon la position du soleil, sa rotation. Le plongeoir prend la forme d’un escalier puis se découpe parfaitement en une marche.

Les piscines de D.Hockney que j’ai retenues n’ont pas de nageur. Je trouve que cela leur confère une intemporalité, une immobilité, propice à libérer la pensée, ma pensée.

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J’ai rédigé un texte suite à ma visite de l’exposition : Je vous joins le lien, sur le titre du texte les Ipads de david Hockney, à la fondation Bergé-Saint-Laurent.

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